Article paru dans le n°6 d'Anjou le Mag, janvier 2024
Écharpe de couleur, mèche grise et lunettes rondes : Claude-Éric Poiroux a une gueule de cinéma. Pas de celles qui attirent spectateurs et projecteurs, en haut de l’affiche ; mais celles sans qui les films n’existeraient pas. Ou moins bien. Depuis plus de 40 ans, sa silhouette, son phrasé et ses anecdotes sont indissociables du complexe Les 400 Coups, à Angers et du festival Premiers Plans : il est propriétaire du premier, délégué général du second.
Le 7e art, il y a consacré sa vie, sans que rien l’y prédestine. « La culture n’est pas quelque chose que l’on m’a donné au premier abord. Je n’ai pas vu de film avant mes 10 ou 11 ans », se souvient Claude-Éric Poiroux, fils de paysans vendéens qui deviendront commerçants, du côté de Nantes. Son premier souvenir de cinéma, c’est à un professeur de français qu’il le doit. « Il était cinéphile et avait vu Le Doulos, de Jean-Pierre Melville, avec Belmondo et Reggiani. On avait écouté en cours l’interview de Reggiani qu’il avait réalisé avec son magnétophone. »
« Impressionné », Claude-Éric Poiroux découvre alors « le mystère » qui entoure cet univers et ses protagonistes. « Une part de rêve et d’imaginaire » qui le fascine toujours autant, soixante ans plus tard. L’autre moment décisif a lieu au début des années 70, alors que le jeune homme suit des études de psycho et de lettre modernes à l’Université catholique de l’Ouest (UCO). « Je suis devenu animateur cinéma pour un office qui préfigurait un projet de Maison de la Culture », détaille l’ancien trotskiste, « au moins dans les idées ». Le projet ne verra jamais le jour, mais le destin de Claude-Éric Poiroux est tracé. « On programmait des séances dans les salles mono-écran d’Angers. Je suis devenu un boulimique de cinéma. » Surtout, il trouve des relais et des amitiés auprès de très nombreux professeurs du département. Un réseau auquel il emprunte l’argent nécessaire pour racheter L’Imperator, en 1975. Devenu Le Club, la salle cartonne avec une programmation « Art et Essai ».
Bientôt, il faut voir plus grand : le 400 Coups voit le jour en 1982. Entretemps, son insatiable appétit de cinéma l’a conduit à Paris. Il y exploite quatre salles construites sur les ruines des Halles Baltard. Il y reçoit Orson Welles, Agnès Varda ; devient distributeur des films de Jarmusch, Carax, ou Lars Von Trier ; produit les premiers films d’Assayas ou de Desplechin ; crée un réseau international de cinémas… Une manière d’assouvir, à travers le 7e Art, son autre passion : le voyage. Papa depuis 2015, Claude-Éric Poiroux a renoncé en partie au plaisir se faire une toile « seul, sans se sentir isolé », pour y emmener sa fille, Alisa.
Claude-Éric Poiroux a fait peu ou prou tous les métiers du septième Art, sans jamais passer derrière la caméra. « Je n’en conçois ni frustration, ni jalousie. J’ai eu la chance de voyager dans le monde entier grâce au cinéma. »
Son Anjou préféré
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Biographie
- 1975 : propriétaire et exploitant du Club, à Angers
- 1982 : naissance du complexe de cinéma Les 400 Coups, à Angers
- 1989 : création du festival Premiers Plans. En 2005, création des Ateliers d’Angers, avec Jeanne Moreau
- 1992 : fondation d’Europa Cinéma, qui réunit plus de 1200 salles dans 750 villes et 38 pays. Il en est aujourd’hui le président d’honneur
- 2015 : naissance de sa fille Alisa