Article publié dans le magazine Anjou&Vous de mai 2022
Le combat d'une vie
Tic-Tac- Tic-Tac… L’horloge tourne, qui rapproche chaque seconde un peu plus Georges Ory de son premier championnat du monde (IBO, poids super mouche). Ce sera le jeudi 30 juin dans le cadre bouillant de l’Ice Parc, à Angers, face au Mexicain Rosendo Hugo Guarneros. « Il va faire connaissance avec la douceur angevine », sourit l’impétueux boxeur. Le noble art a ses codes, ses rounds et ses ceintures, mais l’horloge dont on parle là dépasse les simples limites du ring. Elle est ancrée tout en haut du bras gauche du combattant et trace les contours d’une vie. « Il y a les dates importantes sur ce tatouage. Mes parents, ma femme, mes quatre enfants », détaille le bonhomme. Le ton est plus grave mais le regard toujours aussi franc.
L'importance de la famille
Pas de « Tino » - le surnom donné à Georges par son père à sa naissance, en hommage à Tino Rossi - sans sa famille. Pas de licence sans combattre les réticences parentales. « Mon père aimait la boxe mais ne voulait pas trop que j’en fasse, ma mère avait peur. J’étais pas Tyson ou Ali, je pesais 27 kilos « ! » se rappelle-t-il. La passion est pourtant plus forte et il pousse les portes d’Angers Boxing club à 11 ans. « Ce qui m’a tout de suite marqué, c’est l’odeur de la salle de boxe. J’ai toujours adoré ça. » La première saison et son (gros) lot de défaites conduisent « à des discussions serrées, à la maison ». Mais l’envie est plus forte et les résultats suivent. Tino met peu à peu en place « une boxe intelligente mais violente. C’est un jeu d’échecs où il faut en permanence s’adapter : j’ai un côté défensif, difficile à toucher », complète-t-il, citant volontiers le combattant ukrainien Vasyl Lomachenko comme une référence. « Il a commencé par la danse classique, il a le meilleur jeu de jambes que je connaisse. ». Le gamin progresse, jusqu’à la mort soudaine de son père, en 2007. « Disons que j’aurais pu devenir quelqu’un d’autre, sans le soutien de ma mère et de Patrick, mon entraîneur à l’époque. »
Une promesse pour continuer d'avancer
Georges reprend sa marche en avant, jusqu’à l’équipe de France amateur et la perspective des Jeux olympiques de Londres (2012), pour lesquels il reste finalement à quai. Une blessure profonde – « j’avais un sentiment d’injustice, je voulais tout arrêter » - qui motive à la fois son passage en professionnel et son envie de disputer un championnat du monde. « Je voulais réaliser quelque chose de grand, m’imposer dans une grande compétition. » Il le fait, en devant champion d’Europe (EBU), en 2018, puis en défendant victorieusement son titre… avant de chuter face à son compatriote, Karim Guerfi, à l’automne 2019. Une défaite qui laisse bien plus de traces que le visage en sang du pugiliste angevin. « Je ne voulais plus entendre parler de boxe. Le Covid est arrivé ensuite, j’ai fait une dépression. » Une fois encore, c’est la famille qui rallume la flamme. « Ma fille Laurencia m’a entendu dire à ma femme que je n’avais plus envie. Je l’ai retrouvé en pleurs. Elle m’a dit : « Mais papa, tu m’avais promis de faire un championnat du monde ! ».
Tino rechausse finalement les gants, toujours à Angers. « Je préfère perdre de l’argent et boxer ici que de partir. J’ai besoin du lien familial, c’est une obligation. Ma famille, c’est mon moteur ». « Lors des combats, sa femme Sandra doit être à une place spécifique. C’est un couple qui boxe », appuie Gilles Portejoie, l’un des piliers de la Team Georges Ory, sans laquelle la quête d’un titre mondial ne pourrait se faire. Pour ses enfants, le trentenaire – agent municipal à Angers - reprend aussi ses études et valide un brevet d’animateur.
Au soir du 30 juin, Tino sera champion du monde. Ou pas. L’horloge, elle, continuera de tourner. Tic-tac-tic-tac.
YouTube | Portrait de Georges Ory
Biographie
- 1991 : Naissance à Angers.
- 2002 : Premiers gants de boxe, à la salle Raspail.
- 2007 : Décès de son père.
- 2017 : Champion de France poids coq, en professionnel.
- 2018 : Champion d’Europe (EBU).